Rencontre en altitude (PV Rine)

[Rine étant dans une situation quelque peu incertaine, c'est le duo Aya-Yukari (Raven's Eye) que je jouerai. Les dialogues entre «» sont en langue démonique, ceux entre "" sont en japonais]

Aya avait volé sans relâche pendant deux jours jusqu'à ce qu'un sort malencontreux ne la touche et ruine ce qui lui servait d'ailes, tranchant d'une vive lame de vent sa chevelure azurée. Comme on pouvait s'y attendre, l'atterrissage avait été plutôt foireux, et ce n'est que grâce à l'agilité surnaturelle de Yukari et le relief de la zone que le duo avait pu échapper à leurs poursuivants, bien qu'il était fort probable qu'ils se trouvaient aux alentours, les cherchant.

Pour cette raison, elles avaient marché. Malgré leurs blessures, elles avaient marché. Malgré leur fatigue, elles avaient marché. Malgré leur faim, elles avaient marché. Cela faisait maintenant cinq jours qu'elles fuyaient, et en tout ce temps, elles n'avaient pu se reposer que quelques heures, et encore, uniquement pour récupérer de leur chute.

Après avoir traversé monts et vallées, évitant tout contact avec leurs habitants, de crainte qu'ils ne soient de mèche avec leurs poursuivants, elles étaient arrivées face à ce qui, en ce lieu, passait pour grande étendu plate. N'importe où, cela aurait été considéré une mince vallée, mais comparé au reste de cet endroit, c'était définitivement plat. Si on voulait faire une comparaison, ce serait comme entre les Alpes et l'Himalaya: bien sûr, la première est une chaîne montagneuse, mais comparé à l'autre ce n'est qu'une vague suite de collines. Toujours est-il que ce passage à découvert n'enchantait pas les fuyardes, car maintenant qu'elles avaient perdu leur moyen de voler, elles étaient à la merci de leurs adversaires ailés sur un terrain comme ça, sans appuis pour que la Nekomata puisse faire ses acrobaties pour monter assez haut afin de ramener ses ennemis au sol et s'en débarrasser.

Cette fuite désespérée avait commencé à cause d'une sinistre trahison. Rine leur avait demandé, il y a de ça un peu plus d'une semaine, d'accompagner et soutenir un de ses amis dans sa quête pour sauver sa nièce, quête qui avait conduit le groupe jusqu'au QG des Atias à Matsuyama. Au vu de la situation, tout avait bien commencé, si ce n'est que Yukari avait été capturée, le groupe séparé et qu'ils avaient du affronter l'Ombre d'une puissante membre de l'organisation, l'une des cheffes, comme elles l'avaient découvert plus tard. C'est pendant ce combat que Rine était arrivée, une de ses propres recherches nécessitant visiblement des informations possédées par les suivants de YHVH.

C'était à partir de ce moment que les choses avaient dégénéré.

L'alarme s'était déclenchée, l'Ombre échappée et une armée d'anges s'était lancée à leur trousse. Comme si ce n'était pas suffisant, c'était à ce moment que Shinjiro, l'"ami" qu'elles devaient aider avait proposé un échange à Itoe, l'Eveillée dont le groupe avait combattu l'Ombre plus tôt: Rine contre sa nièce. Possédant toutes deux un puissant artefact démoniaque connu sous le nom de Namérite, elles étaient deux pièces d'une valeur équivalente. Un triste combat s'ensuivit, combat au cours duquel Rine ordonna aux deux démones de fuir, ordre qu'elles exécutèrent avec réticence, mais qu'elles exécutèrent tout de même.

Et depuis, elles fuyaient. N'ayant pas eu de nouvelles de la journaliste, elles supposaient qu'elle avait finalement été capturée, ou pire, mais elles n'avaient rien pu faire pour s'en assurer ou l'aider, la puissance de l'organisation à laquelle elles faisaient face étant bien trop grande. Elles se dirigeaient à présent vers une des caches du Raven's Eye, afin de pouvoir se soigner et essayer de rallier d'autres démons pour tenter une opération de sauvetage. Si seulement il était possible de convaincre - ou même d'avoir une conversation normale - avec la half-fiend Illenia ou le porteur du gémeaux, Naoki, elles n'auraient pas tant de problèmes. Malheureusement, essayer avec la première était risqué, et avec le second, c'était du suicide pur et simple.

C'est alors que le duo réfléchissait à ce qu'elles devaient faire par la suite qu'elles virent un démon, une Lilim ou quelque chose dans le genre, bien qu'avec la distance il était dur d'en être certain, en train de descendre un poil vite. Au vu de son "vol" chaotique, il y avait des chances qu'elle soit blessée. Leurs poursuivants l'avaient ils attaquée? Avait-elle des informations utiles sur la situation? Il n'y avait qu'un seul moyen de le savoir, et le duo commença à avancer en direction du point de chute estimé, Yukari ayant pris son apparence de chat afin de pouvoir surprendre un éventuel ennemi, si un combat commençait.

Elles étaient presque arrivées quand la démone tombante non identifiée (ou DTNI) se planta la tête dans le sol dans un atterrissage digne d'un caillou. Avançant de quelques pas, Aya se tint juste en dessus de la figure prostrée et prit la parole d'un voix qui, bien que froide, laissait entendre une pointe d'inquiétude.

«C'était une sacrée chute. Est-ce que ça va?»

Elle s'apprêtait à lancer un dia, dans le doute, mais elle changea son sort en un garula qu'elle garda en préparation quand la démone se redressa. Non… le terme "démone" ne s'appliquait pas à la créature qui se tenait face à la Moh-Shuvu. Il n'y avait aucun doute possible en voyant les marques lumineuses qui parsemaient son corps: il s'agissait d'une half-fiend, les plus dangereux, et rares, de tous les Eveillés, si on se basait sur la terrible Illenia. Actuellement dans le dos du monstre, Yukari se préparait également au combat, effaçant sa présence le plus possible tout en préparant une volée de dards empoisonnés.

Malgré la tension qui menaçait d'exploser dans un combat sanglant, aucune des deux démones ne lança son attaque, espérant que ce qui se trouvait en face d'elles n'était pas agressif.

Après une telle chute, je ne pouvais qu’avoir honte de moi. Malheureusement, j’étais trop heureuse d’avoir pu voler et un sourire niais s’affichait sur mon visage. Toutefois, l’être qui se tenait devant moi requérait toute mon attention. Je me relevai donc en tentant de modifier mon expression pour quelque chose d’un peu plus sérieux, ce que je réussi à faire sans trop de problème. L’inconnue possédait des cheveux bleus plutôt abimés ainsi que des yeux d’un gris perçant. Pas besoin d’être moi pour comprendre qu’il s’agissait d’un démon mal en point, une Moh-Shuvuu sans doute. Comment je savais ça? Aucune importance.

Elle me demanda en langage démoniaque si j’allais bien. Avant de lui répondre, j’examinai brièvement mes ailes afin de voir leur état. Fort heureusement, elles étaient presque intactes. Je les refermai donc dans mon dos, reportant mon attention sur la démone me faisant face. C’est dans la langue démoniaque que je lui répondis. (On n’est jamais trop prudent. Peut-être qu’elle ne parlait pas le japonais, mais bien une autre langue inconnue et mystérieuse dont je n’avais jamais entendu un traitre mot comme le français ou le brésilien.)

« Oui, je vais bien. »

Je la jaugeai du regard, utilisant mes admirables capacités d’analyse. Je ne comptais pas engager le combat, mais je désirais être renseignée. Mon regard s’affina et la scruta avec intensité. Dans mon esprit s’inscrivirent en lettres de feux une poignée d’informations utiles. Bien que le vent lui était clairement affilié, il pouvait également la blesser. Par contre, elle se délectait de l’électricité et j’avais l’impression que je ne réussirais pas à la maudire celle-là, même si j’essayais très fort. Pour conclure, elle était blessé et sur ses gardes. Quelque chose dans ces montagnes devait être responsable et maintenant la démone devait avoir peur de tout. Ça expliquait sans doute la tension qui l’habitait. Comme toujours, en tant qu’âme noble qui n’aime pas me retrouver piégée au milieu d’un conflit (bon, ça va, je suis lâche on le sait tous déjà) je décidai de la rassurer.

« Je ne compte pas t’attaquer, j’aurais bien trop peur que tu gagnes malgré tes blessures. Mon orgueil en prendrait un sacré choc. »

Et une fois cela fait, je décidai de lui tourner le dos et de partir. Que pouvais-je faire de plus pour l’aider? Ce qui ce passait là n’était pas de mes affaires, mais alors là pas du tout. De toute façon, tous et chacun me détestaient à leur manière alors je ne voyais aucune raison de m’en mêler. C’est donc par hasard que je vis la deuxième démone qui me guettait dans mon dos. Par réflexe, mes ailes firent mine de se déployer, mais je les arrêtai à mi-chemin. Ainsi, je pourrais aisément m’en servir pour me protéger si l’une des deux démons passait à l’attaque. D’un bond que j’aidai avec mes ailes, je m’éloignai de deux ou trois mètres, histoire de ne plus être encerclée. Une fois cela fait, je pris la parole à nouveau.

« Je vois que vous êtes blessées et surtout, je vois que ce ne sont pas de mes affaires. Donc sauf si j’ai quelque chose à y gagner, je ne compte pas rester gentiment avec vous pour jacasser toute la journée. »

Un peu brutal, certes. Malgré tout, j’espérais qu’elles me demanderaient de l’aide. Je pourrais alors leur prodiguer des soins mineurs qui pourraient peut-être faire pour elles une grande différence. Résultat? Elles auraient une belle grosse dette envers moi. Ça tombait bien puisque j’avais justement un petit creux.

J’allais partir et les abandonner à leur sort malencontreux lorsque la voix de la Moh-Shuvuu retentit de nouveau. Elle me demandait d’attendre. Je pris un air agacé, attendant de voir ce qu’elle me demanderait. Malheureusement pour moi, elle ne semblait pas pressée de parler. Je faillis me mettre à taper du pied lorsque l’autre, une nekomata, poursuivit pour elle. En même temps je comprenais, ce doit être si désagréable de s’abaisser à demander de l’aide à une créature comme moi. Pour eux une fausse démone, pour les hommes une horreur déguisée.

La nekomata me demanda de les escorter jusqu’à un camp où elles pourraient reprendre des forces. Ses paroles retinrent mon attention lorsqu’elle mentionna une rémunération. En tant qu’âme généreuse, je ne pu que décider d’acquiescer. Toutefois, l’autre cru bon d’ajouter un commentaire fourbe avant que je ne reprenne la parole. Elle parla de l’échec cuisant de mon tout premier atterrissage. À se souvenir, mes ailes frémirent comme le feraient celles d’une chouette courroucée. Mes yeux rougeoyants se firent mauvais, mais malgré tout je retins mon venin. Je n’avais rien au fait d’être détestée et esseulée, mais qu’on me demande de l’aide pour ensuite me rabaisser… S’il n’y avait pas eu de récompense à la clé, je l’aurais bien laissé mourir celle-là.

« Si tu préfères je peux retourner m’entraîner et vous laisser vous débrouiller. Peut-être même que vos poursuivants me donneraient un bon repas pour une simple direction, ça me demanderais si peu d’efforts. »

J’ignorais si j’avais visé juste, mais j’espérais simplement lui rappeler qu’elle pouvait me mépriser tout en étant reconnaissante. De toute façon, je savais qu’elles étaient vraiment dans le pétrin car, pour être honnête, moi-même je n’aurais pas demandé de l’aide à une demi-démone qui peine à voler comme moi. Quoi qu’il en soit, la perspective d’une récompense était beaucoup trop alléchante. Je tendis donc la main vers elle et libérait dans sa direction un sort mineur de soin, dia. Je répétai l’opération en direction de la nekomata. Si ça ne leur rendait pas toute leur force, ce serait sans doute assez pour continuer jusqu’à leur cache. Une fois cela fait, je mimai un las bâillement avant de parler à nouveau.

« Après tant d’efforts, je fatigue. Mettons nous en route avant que je ne m’écroule d’épuisement. Et en passant, vous pouvez m'appeler Migoto.»

Visiblement, cette… humaine, n'apprécia pas la remarque d'Aya sur ses capacités de vol. Ce qui était assez dommage, car la Moh-Shuvuu avait fait un effort pour aider, au lieu de lancer une pique gratuite. Ce qu'elle avait voulu dire par sa remarque était qu'elle pourrait enseigner l'art du vol au monstre comme partie du payement. Cela dit, elle n'allais pas s'abaisser à se corriger, surtout pas face à ça, d'autant plus qu'elle semblait être d'accord de les aider vu qu'elle avait lancé un dia sur chacune des démones… avant de se déclarer fatiguée. Sérieux, Illenia était clairement une créature incroyablement puissante, et il aurait été naïf de penser que toute sa race soit du même niveau, mais là, c'était juste triste. Il fallait espérer que c'était juste une remarque pour montrer à quel point elle était blasée et "trop au dessus de la vie, quoi".

Sinon, les démones ne voyaient vraiment pas quelle utilité elle pourrait avoir.

Alors qu'Aya ignorait la présentation de Migoto, ce qui n'était pas vraiment une surprise, Yukari décida de prendre les choses en main afin d'éviter que leur voyage se finisse en bain de sang.

"Je me nomme Yukari", se présenta-t-elle, s'inclinant de manière à peine perceptible avant de pointer son bras en direction d'Aya. "Et voici Aya."

Elle avait parlé en japonais car, même si comme tous les démons, elle savait parler leur langue, elle préférait tout de même celle du pays qui l'avait vue naître. De plus, leurs poursuivants ne savaient parler que cette ancienne langue commune et, probablement étant donné qu'elle n'était pas sûre de ce à quoi ça ressemblait, l'hébreux, ce qui rendait la communication moins sûre si le groupe parlait dans un langage que leurs ennemis pourrait comprendre.

Les présentation ayant été faites, Yukari pointa le nord est avant de partir dans cette direction. Au cas où elle jugea utile d'ajouter la parole au geste.

"Le camp devrait être dans cette direction."

Une fois les présentations terminées, la nekomata indiqua la direction à prendre. Cette fois, cette dernière s’exprima en japonais. Cela me rappela plusieurs souvenirs de ma vie antérieure et je songeai même à ma mère. Ça ne signifiait plus rien maintenant, mais à l’époque tout était bien différent. Nous nous mîmes donc en route. Je décidai de fermer la marche, après tout si elles étaient vraiment poursuivies la menace arriverait sans doute dans notre dos. Enfin, je l’espérais car je n’avais pas planifiée d’être encerclée aujourd’hui. Il semblerait que les quelques soins que je leur ai donnés leur ai fait du bien. Nous marchâmes à bonne vitesse durant un bon moment. Je rêvassai en admirant les montagnes qui nous entouraient. Je dois être honnête, je suis heureuse que le monde soit devenu ainsi. Grâce à cela, j’ai accès à tant de paysages magnifiques que la pollution aurait tout simplement détruits. C’est la tête pleine de belles pensées que j’avançais. Pas un instant je ne me demandai la raison de leur fuite. Ce n’était pas de mes affaires et je suis sûre qu’elles m’en étaient reconnaissantes.

Le soleil était maintenant haut dans le ciel et le terrain était toujours aussi escarpé. Je commençais vraiment à me demander si on y arriverait un jour. Toutefois, je fus tiré de mes pensées par une impression. Au début ce n’était rien, puis ce fut une véritable paranoïa. J’avais l’impression d’entendre des bruits de pas et des dialogues qui ne venait en aucun cas de notre groupe. J’hésitai à effrayer les deux autres démones avec mes impressions stupides. À la place, je continuai à marcher tout en jetant de nerveux coups d’œil par-dessus mon épaule. J’ai failli tomber au moins trois fois à cause de ça. Au bout d’un moment, ce petit jeu me devint lassant et j’arrêtai de marcher.

"Nous sommes suivies."

Ce fut la phrase magique. De derrière les montagnes, deux démons que j’identifiai comme étant des Orobas apparurent. Je déployai mes ailes toutes grandes, technique d’intimidation empruntée à je ne sais plus quel oiseau. Ils foncèrent néanmoins sur nous. Le plus près des deux lança même un garu dans son approche. Par pur réflexe, je plaçai l’une de mes ailes devant moi, encaissant le sort. Ce fut douloureux, mais je suis heureusement plutôt résistante au vent. Sans lui laisser la chance de passer de nouveau à l’attaque, je lançai dans sans direction une boule de noirceur, un mudo. Je savais que j’avais touché ma cible, mais je ne pris pas le temps de vérifier les dommages que j’avais pu causer.

"Alors, vous êtes en état pour m’aider un peu sur ce coup là?"

Je n’attendais pas vraiment de réponse à ma question, mais j’avais envie de parler pour entendre le doux son de ma voix. Je me dis que même si elles étaient blessées, elles pouvaient sans doute s’en faire un à deux. Je me déplaçai dont vers la droite dans un grand bond aidé de mes ailes. Je retenais toute l’attention de l’Orobas que j’avais déjà touché avec mon mudo. L’autre se dirigeais vers les deux démones, mais ça ne m’inquiétais pas plus que ça. Elles avaient très bien l’air d’être capables de s’en occuper au moins le temps que j’en finisse avec le mien.